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Live-Report
Austra + Diana à La Laiterie

01 décembre 2013
Rédigé par François Freundlich

Austra + Diana
La Laiterie, 18 novembre 2013



Lorsqu’une soirée torontoise s’annonce, on se dit généralement qu’elle sera bonne, surtout avec le duo canadien de ce soir : Austra et Diana. Les deux formations en A sont différentes mais se complètent plutôt bien. Il est rare qu’une première partie soit à la hauteur de la tête d’affiche, mais c’est bien le cas avec le quatuor d’ouverture.

Diana est donc le premier groupe à se produire avec leur électro-pop atmosphérique downtempo. Les membres du groupe sont excessivement multitâches puisque le claviériste passe subitement au saxophone, le batteur fait résonner ses fûts pour subitement se lever et lancer quelques beats. Quant à la charmante chanteuse, il lui arrive d’oublier sa guitare et de la saisir en plein morceau lorsqu’elle s’en rend compte. Ou peut-être est-ce dû à son mal de dos du soir, ce qui la rend un peu statique. Elle est néanmoins assez loquace et drôle lorsqu’elle propose à un public un peu froid de se déshabiller pour danser plus à son aise. Il suffit d’obéir et de dévoiler son t-shirt pour qu’elle nous salue par un « two thumbs up ». La voix est suave et douce, n’en fait jamais trop dans la surenchère pour rester dans un envoûtement magnétique et fragile. Certaines compositions se présentent comme de vrais tubes, même si les adaptations live sont calibrées pour la danse avec une surenchère sur la rythmique, noyant parfois les nappes de synthé omniprésentes. Les passages au saxophone so 80’s nous feront sourire mais collent plutôt bien à l’ambiance synth-pop de Diana. Une certaine quiétude s’installe sur New House, où les Canadiens laissent parler leurs aspirations cold wave permettant d’apprécier la voix de Carmen Elle sans qu’elle ne soit dépassée par l’instrumentation. On pense parfois à Beach House comme sur l’envoûtante Anna, jusqu’à ce que l’électro ne reprenne les devants pour révéler le son plus Dirty des Diana. Ce groupe est en tout cas une vraie découverte, avec un concert qui nous a remués et passionnés.

La tête d’affiche du soir était les très hype Austra, si l’on en croit le public très hype lui aussi. Dès l’entrée en scène, le regard est attiré par Katie Stelmanis et ses pas de danse en équilibre, surtout lorsque l’on aperçoit ses souliers mi-sandales, mi-chaussures de ski, avec chaussettes. La surprise passée, on se focalise plutôt sur sa gestuelle et sa voix qui paraît légèrement forcée après un concert de Diana plus candide. Katie s’avance souvent au plus près du public lorsqu’elle ne se déhanche pas derrière son synthé. Elle se plaît à prolonger les syllabes au maximum sur des chœurs spectaculaires au premier abord mais crispants sur la longueur. Il faut dire que la voix est travaillée différemment sur le dernier album en date, avec un côté diva bien plus présent. La batteuse à lunettes géantes est quant à elle bien plus relax, n’hésitant pas à se désaltérer d’une tasse de thé pendant les morceaux plus calmes : on vient donc de trouver le comble du hipster. Le début du concert est entièrement consacré à des extraits du second album Olympia, un peu moins captivants que les tubes du premier album qui déchaîneront le public sur la fin du set. Des parasols colorés lumineux s’éclairent par intermittence alors que les deux claviéristes font parler les lancinants synthés, joignant l’électro et la pop sur des rythmes au ralenti donnant un côté épique aux compositions, comme sur Hurt Me Now. Le minishort du claviériste est tout aussi épique. Le saxophoniste de Diana se joindra de temps à autre Austra pour marquer la soirée de son empreinte venteuse. Katie, toujours très démonstrative, s’agenouille telle une prêtresse synthétique pour se laisser aller complètement à sa musique. On pense parfois aux danses tribales de Zola Jesus, sauf lorsque l’électro reprend les devants, comme sur Beat and the Pulse. Ce tube immédiat fait réagir le public avec ses basses agressives, addictives et irrésistibles accélérant subitement la cadence : le meilleur moment de la soirée. Le show se terminera sur Lose It et ses aigus d’opéra assez compliqués à interpréter surtout après plus d’une heure de prouesses vocales. Cela suffira néanmoins à nous incruster cet air en tête après le concert.

Ce duo de groupes canadiens a tenu toutes ses promesses, avec la très bonne surprise Diana qu’on espère retrouver en meilleure santé à une autre occasion. Austra a confirmé qu’ils sont bien l’une des formations les plus dansantes du moment : ces deux filles et deux garçons pourraient nous faire danser jusqu’aux aurores australes. 


Photos de Eric Schneider