Webzine indépendant et tendancieux

Live-Report
Clinic - La Maroquinerie

24 décembre 2014
Rédigé par Amandine Hénon

Ce soir, c’est Gonzaï qui invite et on imagine très bien que vu l’affiche, on ne risque pas de s’ennuyer et les surprises vont affluer. La Maroquinerie fera donc quasiment salle comble pour un cocktail britannique grand cru composé de trois formations décapantes.

Les petits jeunes nommés pour ouvrir le bal sont irlandais. L’ambiance est sombre et suinte de tous les coins. La chanteuse de The Altered Hours, jeune blonde peroxydée, est enfermée dans un carré lissé avec une longue frange lui couvrant à demi le regard. Total look noir, elle semble tout droit sortie des romantiques 80’s et ce ne sont certainement pas les reverbs qui nous feront changer d’avis. Cependant, un je-ne-sais-quoi d’évanescent et de psyché nous rappelle un Jefferson Airplane des temps modernes. D’ailleurs, on se dit bien vite que si le groupe avait œuvré en 2014, il aurait pu ressembler à The Altered Hours. C’est donc autour de titres bruts et synthétiques que s’articule ce set tout en tension. Mâchoires serrées, le chanteur dégage lui aussi une aura mystérieuse qui fera que dès ce début de soirée, nous serons « dans le truc », contrairement à une partie de nos congénères qui compte bien profiter du bar à whisky parrainant la Gonzaï Party.
De l’Irlande du Nord à l’Ecosse, il n’y a qu’un pas et ce sont The Cosmic Dead qui vont nous le faire franchir.
Il faut bien avouer que l’on ne comprend pas trop bien ce qu’il se passe sur scène lorsque les barbus chevelus se pointent : balances ? Premier morceau ? Ce n’est qu’au « On a besoin de pisser avant de commencer, on revient rapidement ! » que l’on sera fixés. Ce que l’on sait de ces énergumènes, c’est qu’ils avaient fait forte impression en juillet dernier lors de leur passage au Paris International Festival of Psychedelic Music. Positionnés en cercle autour du batteur, le groupe ne compte pas occuper la totalité de la scène et le fait de tourner le dos au public ne semble pas déranger les guitaristes le moins du monde. Rapidement, on perd la notion d’espace et de temps ; en effet, The Cosmic Dead avouent avoir un faible pour l’improvisation et ils ne sont pas là pour recracher leurs morceaux à l’identique, c’est d’ailleurs ce qui sera le point d’orgue de ce concert. De ce fait, aucune structure sous-jacente n’apparaît et nous nageons dans la performance. Rien ne les démonte, pas même les problèmes techniques et le guitariste ne réussissant pas à reprendre la main, même après un changement de guitare n’hésite pas à sortir de scène pour amener un nouvel ampli, sans que le reste de la bande ne s’en préoccupe. Les guitaristes œuvrent tels des chamans implorant leurs pédales.
Finalement, ce sera une totale ovation pour cette pièce en deux actes (car les quarante minutes de représentation n’auront permis à The Cosmic Dead de ne jouer que deux « morceaux »).
La troisième partie de soirée, et non des moindres, se passera du côté de l’Angleterre cette fois avec les chirurgicaux Clinic. Les balances se déroulent dans la douleur pour les spectateurs avec des essais sons pour le clavier qui font vriller nos tympans. Peu importe, c’est un moindre mal pour enfin assister à une opération de cette bande inclassable. Comme à leur habitude et témoignage de leur marque de fabrique, c’est en tenue de chirurgiens et masques leur barrant le visage qu’ils débarquent. Force est de constater que dès que commence un titre du premier album, Internal Wangler, la force de leur talent nous éclate d’autant plus en pleine face. On voyage dans la discographie de Clinic et les ambiances se suivent mais ne se ressemblent pas : aseptisé, froid et martial. Clavier, clarinette, melodica, c’est très riche musicalement et le post-punk qu’ils proposent nous embarque dans les bas-fonds de l’Angleterre. Au rappel, on entend résonner la petite mélodie au melodica de The Return of Evil Bill et là, c’est la transe totale.

Une voix canardeuse, un harmonica malade et un clavier grinçant : cette description grotesque en ferait fuir plus d’un et pourtant, ce sont bien les raisons qui ont fait de ce concert de Clinic un moment exceptionnel pour terminer notre année musicale 2014.

A l’année prochaine, pour d’autres aventures tout aussi palpitantes !