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Live-Report
Festival des Artefacts : Birth of Joy + Von Pariahs + Peter Peter

10 avril 2014
Rédigé par François Freundlich

Festival des Artefacts : Birth of Joy + Von Pariahs + Peter Peter
La Laiterie, 2 avril 2014



Le Festival des Artefacts reprend ses droits avec une soirée d’ouverture dans la salle de La Laiterie pour un trio de groupes allant de la pop canadienne au rock psychédélique en passant par le post-punk. Le Montréalais Peter Peter ouvrira le bal, suivi par les Nantais rageurs de Von Pariahs, avant un set tout en longueur des Hollandais de Birth of Joy pour clôturer la soirée.

Fraichement débarqué en France, Peter Peter, dernier chouchou de quelques médias comme France Inter, est attendu par quelques fans (dont quelques filles) connaissant déjà les textes oniriques de son album à peine sorti. Le Québécois arbore un air légèrement prétentieux derrière sa mèche, masquant certainement une certaine timidité puisqu’il se révèle assez sympathique lorsqu’il prend la parole. Son live est résolument tourné vers les 80’s avec des boucles de synthés, un saxophone aux échos lointains et une guitare aux résonnances à la The Cure. Il en ressort néanmoins une certaine fraîcheur dans ces textes en français déclamés avec une voix juvénile mais plus grave qu'en studio, rappelant les pop-songs de Malajube. Peter Peter est moins direct et n’hésite pas à étirer ses morceaux dans de longs solos instrumentaux enflammés par un saxophone parfois kitsch et quelques déchaînements de guitares, comme sur cette version de son single Une version améliorée de la tristesse. Son titre le plus évident est le tournoyant Carrousel, qui subit également une adaptation synthétique. Ses textes qui nous plongent au cœur de Montréal (« Au sommet du mont Royal », « lorsqu’arrive la rue St-Laurent ») sont destinés à une fille que le chanteur a croisée dans le bus : il a alors décidé de prendre ce bus tous les jours. Ce grand romantique introduit d’ailleurs beaucoup de morceaux par « cette chanson est pour une fille ». La prestation de Peter Lover a finalement un peu tourné en rond et l’on retiendra ces quelques bonnes chansons qui nous tourneront dans la tête.

L’un des meilleurs groupes de la scène française actuelle s’empare ensuite de la scène de La Laiterie : les Von Pariahs sont prêts à déchaîner leur post-punk sombre et incisif. Le chanteur anglais Sam Sprent se déchaîne à l’avant de la scène, libérant une voix tendue et abrasive. Comme ses mains ne sont pas occupées par un instrument, il joue davantage avec le public et attire l’attention sur lui avec une présence scénique indéniable. Les Von Pariahs nous offrent une première grosse claque avec Skywalking et son refrain addictif à la Talking Heads « Why do you hate me for what I am, then you love me for what I’m not? » prenant une autre dimension par rapport à la version studio : il nous prend l’envie de le voir se répéter à l’infini. Dès lors, nous sommes totalement sous le choc de la puissance dégagée par le sextet avec cette basse effrénée, prolongeant une rythmique saccadée et des riffs de guitares enragés. Le public s’enrage également : qui aurait cru que ce gentil public de Peter Peter se transformerait en un mouvement de foule déchaîné dans la fosse ? Les Von Pariahs se livrent totalement, leurs morceaux s’enchaînant sans temps mort en nous explosant les tympans. On pense parfois à Joy Division ou aux Jesus & Mary Chain en se disant que ce groupe représente le haut du panier des formations françaises actuelles, pouvant largement s’imposer à l’étranger. On s’excite encore plus sur le single Someone New et son urgence déviante totalement addictive, le public ne s’y trompe pas en criant le refrain avec le groupe. Les Von Pariahs sont parvenus à créer une ambiance et une communion comme on en voit rarement, nous espérons recroiser leur route le plus souvent possible dans les prochains festivals d’été.

Pour terminer la soirée, des Hollandais planants, Birth of Joy, s’avancent devant un public qui semble s’être un peu évaporé. Peut-être que certains avaient déjà eu leur compte de décibels mais les plus résistants savent que ce trio était l’enchaînement idéal pour suivre Von Pariahs. Les deux groupes avaient d’ailleurs livré deux des meilleures prestations des Transmusicales de Rennes 2012 et ont fait du chemin depuis. Un grand drapeau jaune orné d’un corbeau est suspendu au-dessus d’un batteur déchaîné, amateur de lancer-rattraper de baguettes. Les trois blonds enchaînent des boucles hyper rapides entre un blues punk trépidant et rock psychédélique orné de synthés vintage. Les Birth Of Joy offrent avant tout un show spectaculaire et rock’n’roll, rappelant la chaude prestation de Hanni El Khatib dans cette même salle. Ils se définissent eux-mêmes comme « Sixties on Steroids » : on ne trouvera pas de meilleure définition. Les Hollandais parviennent à réunir les Ramones, Elvis et les Pink Floyd tout en conservant une bonne humeur communicative. Car oui, les Birth Of Joy sont très sympathiques avec leurs bouilles d’adolescents, leur sourire aux lèvres et leurs blagounettes. Ils sont également généreux car leur set va se prolonger bien au-delà de l’heure et demie, offrant plusieurs rappels à un public clairsemé qui en voudra toujours plus. Le dernier solo de batterie avec envolées de bâtons nous aura achevés, nous voilà encore plus conquis par ces joyeux garçons qui savent faire le show.

Après une douce introduction sur la pop gentille de Peter Peter, la soirée a tourné à l’incendie avec un concert dantesque des Von Pariahs et une prestation enragée des Birth of Joy. On en ressort les oreilles en miettes et de la joie plein la tête.


Photos de Patrice Hercay