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Live-Report
Motorama + Robi à La Laiterie

01 octobre 2013
Rédigé par François Freundlich

Motorama + Robi
24 septembre 2013 - La Laiterie, Strasbourg



Les deux groupes du soir n’étaient pas forcément faits pour se rencontrer, mais le hasard a voulu que les routes de Motorama de Rostov-sur-le-Don et Robi de… un peu partout, se croisent à Strasbourg en cette chaude soirée de septembre. Voilà l’occasion de découvrir deux identités propres et en devenir de la pop actuelle.

La soirée débute donc avec Robi, alias Chloé Robineau, parisienne ayant grandi dans plusieurs pays d’Afrique et à La Réunion. Cette rockeuse n’a pas de nom de famille qui pourrait la rendre célèbre, comme Williams, Thicke, ou au hasard Higelin, Doillon… Mais avouons qu’elle nous fait une meilleure impression que les précitées de par ses compositions, ses textes ou bien son énergie. La jolie Robi et son groupe forment un power trio incisif : des guitares enlevées répondent à une voix bluesy et quelques synthés bien placés. Il n’est pas chose aisée de faire du rock en français, surtout que nous pensions d’abord assister à une prestation bien plus french-pop de la part de la protégée de Dominique A. Mais Robi lâche les chevaux dès le départ en frappant violemment du pied sur son tapis magique qui dissimule un système lui permettant d’amplifier la rythmique. Son acolyte guitariste / claviériste / batteur n’est pas en reste puisqu’il enchaîne les instruments pour faire vibrer des morceaux tendus grâce à des riffs lourds rappelant parfois le groupe Eiffel, comme son single Ma Route. Elle l’interprète au début du concert : son adaptation live nous fait de l’effet avec ces montées et descentes de synthé vintage, ce crescendo de saccades électriques s’élevant jusqu’à un fiévreux final assourdissant. Robi nous a déjà dans sa poche, même si on s’enflammera moins sur certains titres moins emportés. La chanteuse annonce alors la reprise de Il Se Noie du groupe de new wave français des 80’s Trisomie 21, que le groupe a tellement jouée ensemble qu'elle est présente sur son premier album. Ce morceau est un tube en puissance, son adaptation live nous transperce par sa frénésie intérieure symbolisée par ce phrasé parlé et ces textes tourmentés. Une autre excellente reprise fera notre bonheur : Lolita Nie En Bloc de Noir Désir parachèvera un concert plus que convaincant, qui aurait mérité un public plus nombreux. Un ange passe.

Une fois n’est pas coutume, c’est donc un groupe russe qui va fouler la scène de La Laiterie : la petite troupe de Motorama. Ces popeux sont bien moins déchaînés que leur première partie, vivant leur musique plus intérieurement. Le groupe semble avoir du mal à se lancer, ne s’étant peut-être pas tout à  fait réglé sur les premiers titres dont la voix reste peu audible. Les Motorama ont également l’air un peu fatigués, ce qui est certainement dû à une tournée assez intensive. Mais qu’importe, leur rock ensoleillé influencé par leurs homologues américains nous fait vaciller en rythme sur des morceaux entêtants, bien que se ressemblant beaucoup de l’un à l’autre. Le chanteur Vladislav Parshin semble un peu timide sous ses airs de geek gêné par ses lunettes, mais Matt Berninger ne disait-il pas « I’ll explain everything to the geeks » ? La ressemblance de sa voix avec celle de The National est frappante, si ce n’est cet accent russe nous faisant parfois douter de la langue utilisée, qui est pourtant bien l'anglais. L’opinel toute lame sortie accroché à son pantalon ajoute un peu de piquant à son personnage. Une légère guitare surf côtoie une rythmique binaire et uptempo alors que la charmante bassiste en jupette remue ses cheveux en cadence. Après un début de concert poussif, Motorama s’emballe finalement sur les quelques titres qui précéderont le rappel avec notamment Alps et sa guitare envoûtante. Deux morceaux concluent le concert pendant un rappel plébiscité par un public plutôt conquis. Les morceaux de Motorama sont parfois redondants, ce qui peut provoquer l’impression de tourner en rond, mais ils restent un bon groupe à voir se produire si l’on n’en demande pas trop.

Voilà une paire de groupes qui aura fait notre bonheur pour une soirée pop toute en ferveur. Robi est néanmoins celle qui nous a fait la plus forte impression, la demoiselle pourrait clairement tenir une scène plus grande et un public plus nombreux. 


Photos de Eric Schneider