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Chronique de disque
múm - Smilewound

24 septembre 2013
Rédigé par François Freundlich




múm - Smilewound

Sortie le 6 septembre 2013

Note : 4,5/5





Le troisième groupe le plus connu d’Islande ne nous avait jamais vraiment quitté depuis ces quatre années d’absence. Ils occupaient toujours l’acoustique nos jours de pluie, ou de neige selon la chance, de leurs fabuleux albums qui semblent provenir du sous-terrain d’un glacier à l’écho de cathédrale. Ce septième album studio marque un virage pop pour Múm, symbolisé par ce duo improbable avec Kylie Minogue datant de l’an dernier et figurant en bonus du disque. Mais rassurons-nous, le sol ne s’est pas encore dérobé sous leurs pieds et ce Smilewound flirte encore avec les sommets.

Décrire un album de Múm serait comme mettre des mots sur chaque paysage traversé par la route nº 1 en Islande : une simple chronique sur un webzine aussi jaune soit-il ne suffirait pas. L’électro minimaliste y prend une part importante, mais se lie admirablement à des méandres acoustiques mystérieux faits de violons, de pianos ou de voix sucrées et cristallines. Comme toujours avec Múm, les arrangements font l’objet d’une recherche importante, les instruments s’ajoutent, se complexifient tout en conservant des inspirations atmosphériques renvoyant des images cinématographiques en slow motion. D’un titre à l’autre, la couleur et la lumière évoluent, passant d’un folktronica apaisé semblant s’évaporer dans l’infini, à des rythmiques dansantes doublées par des synthés 8 bits donnant l’impression d’avoir passé un niveau à Cliffhanger sur Game Boy. On reste suspendu à leur falaise, en ayant l’impression qu’en cas de lâcher-prise, on flottera tout de même dans les airs. Ce sentiment provient avant tout de la voix limpide et angélique de Gyða Valtýsdóttir, de retour dans le groupe après avoir laissé les rênes à sa sœur jumelle Kristín pendant... onze ans.

Outre Gyða, les incursions électro-pop sont la grande nouveauté de cet album : on sent que Gunnar Örn Tynes a laissé emporter son élan de FM Belfast vers son groupe originel. Cela se remarque dès la très belle ouverture sur ToothWheels ou d’autres titres à refrain singalong comme When Girls Collide avec des harmonies vocales succédant à des chœurs entraînants. La cadence y est alors bien plus rapide qu’à leur habitude, semblant percer la calotte glacière avec un certain sens du rythme. Ces quelques emportements sont alternés avec des morceaux bien plus calmes comme la délicieuse Underwater Snow, restant dans la simplicité d’un piano et d’une voix atteignant des aigus nous laissant en totale béatitude. Slow Down ralentira également l’ambiance avec des beats sourds et caverneux parsemés de bruits insaisissables qui apparaissent puis disparaissent tout comme ce refrain, « slow down so I can catch you ». Le contre-pied total viendra de One Smile, couplant un glockenspiel enfantin, une basse flirtant avec le math rock et des violons aux inspirations orientales pour former l’un des titres les plus étourdissants de l’année. La voix répète ces « One Smile » sur une rythmique épileptique avant que des variations de violoncelle ne reprennent le dessus et que des voix fragiles ne terminent ce fabuleux morceau comme une captivante berceuse. Múm fait tout pour nous décontenancer, mais l’album reste cohérent entre l'up-tempo The Colorful Stabwound ou les violons torturés sur la très pop Sweet Impressions. D’une ballade toute en langueur idéale pour regarder tomber la neige, les Islandais nous réveillent subitement en nous piquant le cerveau de leurs mouvements déconcertants.

Voilà un album idéal pour l’automne qui s’écoutera encore probablement tout l’hiver. Múm signe avec ce retour son album le plus abouti, prenant la forme de perles électro-acoustiques à la frontière des genres. Cette scène islandaise n’a jamais fini de nous surprendre, nous abreuvant de nouveaux groupes ou de ces gloires toujours au rendez-vous dont fait pleinement partie Múm