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Live-Report
Eagulls + Youth Avoiders à L'Espace B

17 décembre 2013
Rédigé par Amandine Hénon

Eagulls + Youth Avoiders
L'Espace B, le 28 novembre 2013

Défiant l’humidité ambiante qui s’abat sur la capitale depuis quelques jours maintenant, nous poussons la porte vitrée de la rue Barbanègre, certains de trouver à l’intérieur bonne humeur et chaleur. Une fois n’est pas coutume, les mines sont renfrognées, les visages fermés… et pour cause ! La nouvelle vient de tomber, quelques heures plus tôt : l’Espace B subira une fermeture administrative de neuf jours suite à un dépôt de plainte d’un voisin fort peu tolérant. Les soirées prévues sont donc déplacées ou tout bonnement annulées, créant un manque à gagner indéniable pour la structure qui œuvre pourtant quotidiennement afin de proposer aux spectateurs des réjouissances quotidiennes. Eagulls porteront donc le drapeau de l’insoumission en cette dernière soirée, comme pour venir clamer qu’un caillou dans les roulements ne viendra pas entacher le travail de l’équipe.

Il est déjà 21h30 quand Youth Avoiders, potes de nos petits gars de Leeds, débarquent sur scène devant un public épars, à notre grand étonnement. Le set des Français sera court mais intense ; délivrant un hardcore puissant, corrosif et ultra-speed, ils enchaînent les morceaux à la vitesse de l’éclair et la demi-heure échue, le public est désormais prêt à accueillir le groupe qui a enflammé les cœurs ces dernières semaines.
Visuellement, Eagulls seraient aux antipodes du star system, empruntant plus aux anti-héros de Wayne’s World qu’à un Matthew Bellamy : coincés dans des décennies closes depuis longtemps, les jeunes musiciens n’ont visiblement que faire de leur look et semblent bien plus préoccupés par leurs bouteilles de vin rouge que par leurs coupes de cheveux.
Aussitôt les guitares branchées, on ne perd plus de temps et c’est sur leur dernier single en date, Nerve Endings, que débute le concert le plus palpitant de cette fin d’année 2013. Avec un album qui sortira durant le premier trimestre 2014, la surprise est totale et nous découvrons ce qui promet d’être une pépite noisy/punky/grungy/whatever-you-want. Si Eagulls paraissent tout juste sortir de l’adolescence, leur musique, elle, possède à la fois la fougue de la jeunesse et la maturité artistique nécessaire. Pour reprendre une comparaison maintes fois éculée et souvent employée à tort, George, le chanteur blondinet filiforme, semble transformé dès lors qu’il entame le premier titre. Regard vide vers le fond de la salle, gestuelle saccadée, la ressemblance avec Ian Curtis est flagrante et plus que jamais cette vision nous réjouit et nous intime à suivre Eagulls dans leur monde ténébreux. Les basses résonnent et claquent, faisant vibrer les enceintes et chavirer une bouteille de vin posée à portée de mains pour le guitariste. Imperturbables, les jeunes garçons continueront un show relativement court mais incroyablement intense.
Dans une discrétion très informelle, les Anglais quittent la scène comme ils l’avaient investie mais couverts de sueur et le regard hagard.

Sans nul doute, Eagulls compteront parmi les groupes à suivre en 2014 et leur présence scénique de ce soir ne fait qu’augmenter notre impatience à les retrouver très vite.

Photos Alan Kerloc'h