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Live-Report
Wire + Hermetic Delight à La Laiterie

12 novembre 2015
Rédigé par François Freundlich

On s’était préparé à une soirée brulante à la Laiterie avec un groupe culte du punk 70’s puis du post-punk et du shoegaze actuel : les londoniens de Wire. On a effectivement transpiré au vu des températures exceptionnelles, de la petite salle remplie mais aussi de la première partie : les wavers de Hermetic Delight. De quoi s’enflammer les tympans pour un bon bout de temps.

Le quintet bouillant est de retour sur ses terres à l’occasion d’une mini-tournée qui s’achèvera par le festival off des Transmusicales de Rennes : les Bars en Trans. Pour se mettre en jambe, quoi de mieux que d’ouvrir pour l’un de leurs groupes références ? On retrouve chez Hermetic Delight toute la rage et la nervosité d’un post-punk jouissif martelé par une rythmique n’ayant rien à envier à celle de la tête d’affiche du soir. Toute l’attention se porte sur la chanteuse Zeynep à la gestuelle sensuelle et à la voix teintée de velours ardent pouvant s’échauffer à tout moment dans des éclats perçant les incantations électriques des deux guitares. Celles-ci vrombissent en permanence dans un brouillard noisy qui à tendance à s’épaissir plus le concert avance, les influences shoegaze à la My Bloody Valentine ressortant d'avantage sur les nouveaux titres d’un album à paraître en 2016. Les oscillations new-wave s’extirpant dans de lancinantes mélopées pop-punk des premiers titres ont tendance à se fondre dans des crescendos fantomatiques et se perdre dans la folie, comme lorsque la chanteuse s’agenouille en invoquant les esprits par des cris subits et déchirants. Le club Laiterie bouillonne sous les derniers assauts graves et furieux du quintet magnétique qui poussent tout de même à remuer corps et âme malgré le vent solaire qui semble nous coller aux murs. Ce groupe pourrait transpercer toute protection hermétique se trouvant sur son chemin et le public extasié en a fait l’expérience.

Après cet énorme tour de chauffe, nous nous réjouissons de voir s’installer les héros Wire, aussi calmes et impassibles que leur musique n’est tumultueuse. On pensait avoir atteint des sommets sonores mais le volume augmente encore sur les premières déflagrations popgaze des premiers titres extraits de leur dernier album éponyme comme l’effrénée Blogging et son refrain sarcastique «  I’m Youtubing hope ». Les anglais vont remonter le temps en passant par leur phase post-punk pour revenir aux sonorités brutes de décoffrages de leurs premiers tubes punks de la fin des années 70. Du quatuor du départ, il ne reste que trois membres originaux puisque la deuxième guitare est assurée par Matthew Simms du groupe It Hugs Back. Le trio de soixantenaires est pourtant toujours au top de sa forme avec la voix sombre et monocorde de Colin Newman, éclosant tout en subtilité des textes toujours juste sur la société actuelle et ses excès. La basse trépidente de Graham Lewis nous fera nous déhancher plus d’une fois sur ses répétitions post-punk saccadées qui ont influencé tellement de formations depuis quarante ans. La base de toute la wave se trouve bien entre ses mains expérimentées qui ne cesse de s’agiter sur son instrument. Et que dire de la batterie de Robert Grey qui se révèle complètement sur les vieux morceaux punk comme Brazil ou Used To ?. Le groupe se concentre pourtant sur les extraits de son dernier album qui sera joué pratiquement dans son intégralité. L’occasion de se rendre compte qu’il s’agit peut-être de l’un de leurs plus aboutis puisque les meilleurs moments de la soirée en sont extraits. On retiendra particulièrement cette version new-wave de In Manchester dont le refrain nous colle encore à la tête. Cette chanson est bien la preuve que Wire peut toujours écrire des tubes immédiats et sans concession. Ce groupe ne s’arrêtera jamais d’être au sommet de ses compositions et de ses prestations live.

Après ces deux concerts, entre les maîtres et leurs héritiers, on a comme l’impression d’entendre des échos lointains dans nos crânes. Hermetic Delight a su nous faire bouillir là ou Wire nous a définitivement évaporé. 


Photos de Patrice Hercay