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Live-Report
Zola Jesus + Hermetic Delight - La Laiterie

11 novembre 2014
Rédigé par François Freundlich

Zola Jesus + Hermetic Delight
La Laiterie, 5 novembre 2014


Avouons que sur ce site, nous avons une légère faiblesse pour la petite enchanteresse dansante Zola Jesus. Pour accompagner la sortie de son cinquième album Taïga, l’Américaine est en pleine tournée européenne, nous l’avons donc retrouvée dans le club strasbourgeois de La Laiterie pour un concert hypnotique à la rythmique redoutable. Pour ouvrir la soirée, l’un des meilleurs groupes locaux est de la partie avec le quintet magique Hermetic Delight.

Tout juste rentrés d’une tournée-fleuve sur les routes d’Allemagne, Hermetic Delight arrivaient tout droit de Leipzig où ils s’étaient produits la veille au soir. Pas entamé pour autant, le groupe va livrer une prestation tout en puissance, emportée par des souffles post-punk ou des élans pop-wave. Les guitares à reverb entrent en collision dans de lentes mélopées cataclysmiques, calmées par la voix suave et charnelle d’une chanteuse aux mouvements langoureux. Les assauts graves et lancinants sont prolongés dans des instrumentaux menés par une batterie métronomique et surpuissante. Les (déjà) anciennes compositions comme la marathonienne Heartbeat ou la punchy Lull se mêlent à de nouveaux titres des plus prometteurs dont on attend impatiemment les versions studio. Les inspirations de My Bloody Valentine ou Siouxsie and the Banshees viennent se mêler à des sonorités pop à la The Cure, dont le Funeral Party sera adapté dans une version cryptique. Les reprises de volée électriques agressives sont déviées par des dérivations de synthé anguleuses, le tout porté par un jeu de scène nous laissant sans cesse sur le qui-vive. Voilà l’un des groupes les plus prometteurs de la scène post-punk / new-wave actuelle.

Nika Roza Danilova, alias Zola Jesus entre sur scène, s’installant à l’avant d’une sculpture géante en papier qui va s’illuminer et se colorer différemment tout au long du concert. On ne verra pas Zola Jesus jouer d’un instrument comme c’était le cas sur sa précédente tournée où on l'admirait au piano, elle est cette fois seule à l’avant de la scène devant son micro, concentrant toute son énergie sur sa voix. L’introduction se fait a capella sur le premier titre de son nouvel album dans un moment quasi religieux, avant que la batterie n’explose avec brutalité et que la chanteuse ne se jette au sol en remuant dans des mouvements convulsifs. Dans ses crises harmoniques, Zola Jesus paraît possédée, se couchant ou allant même jusqu’à grimper sur les enceintes. Elle est sur cette tournée accompagnée par deux claviéristes dont un fera également résonner quelques cuivres ainsi que d’un batteur qui cogne ardemment son instrument. L’Américaine a décidé de jouer l’intégralité de son album dans l’ordre et il est donc difficile de s’accrocher à une sonorité connue. Elle nous expliquera par la suite qu’elle veut avant tout aller de l’avant, quitte à délaisser ses anciens morceaux. On trouvera tout de même sur la setlist les vaporeuses Clay Bodies et Sea Talk, extraites de ses deux premiers albums, créant un tunnel pop au milieu de sonorités davantage électroniques et synthétiques. La voix de Zola Jesus s’impose d’elle-même, parfois comme brisée, à d’autres moments héroïque. Elle nous transperce, nous laissant dans l’admiration. Elle descendra finalement de la scène pour faire le tour d’un public attentif, dédiant ses textes à quelques chanceux tout en les regardant dans les yeux. La déesse terminera finalement sur deux anciens titres pour le plus grand plaisir des fans. La cathartique Vessel verra Zola Jesus pousser un cri déchirant avant de se rouler au sol avant que Night ne termine le concert dans des sonorités industrielles.

Voilà une performance comme on en voit très peu : Zola Jesus est un personnage unique dans la musique actuelle. En ne jouant presque que ses nouveaux morceaux, nous l’avons redécouverte sous un nouveau jour, donnant l’impression qu’elle possède un nombre infini de facettes. Et une énergie créatrice hors du commun.