Webzine indépendant et tendancieux

Live-Report
JJ + For BDK à La Laiterie

16 décembre 2014
Rédigé par François Freundlich

JJ + For BDK
La Laiterie, 11 décembre 2014


La froideur électronique suédoise a envahi la salle de La Laiterie au point de se demander si on allait vraiment retirer nos moufles à l’entrée. Les dignes représentants de cette riche scène du pays des Hives et de Lisbeth Salander sont l’énigmatique duo JJ, précédé de la non moins blonde For BDK. Une soirée qui s’annonce pour le moins très acronymique.

Le premier duo venu de Stockholm entre en scène, la mystérieuse Adèle Kosman voyant sa toge brillante éclairée tandis que Marcus Borrman reste dans l’ombre. Ce dernier s’occupe des productions électro-pop flottantes, qu’il déploie en tonnant sur sa MPC avec des baguettes de batteur. La voix de la chanteuse se perd dans des échos vaporeux s’envolant dans des aigus libérateurs. Le vocodeur qu’elle utilise parfois la transforme en un robot aux intonations graves nous rappelant grandement Fever Ray et The Knife, même si elle mise davantage sur son côté diva pop. On tombe rapidement sous le charme de compositions intenses qui nous tiltent immédiatement l’oreille. Une ambiance particulière s’impose d’elle-même, la lente gestuelle de prêtresse dévoilant ses longs ongles et ses tatouages n’y est pas étrangère. De minutieux blips sont prolongés par des beats aux larges échos et au développement parfois angoissant ou oppressant de weird synth-wave sous prozac. Adèle nous remercie de sa voix vocodée de T-Rex sous hélium. On ne s’attendait pas à vibrer de la sorte avec cette première partie débridée.

Le mystère continue lorsqu'Elin Kastlander, moitié du groupe JJ, entre en scène dans une toge à capuche aux reflets dorés. Elle s’approche timidement du micro pour ne plus le quitter, imposant une ambiance intimiste de sa douce voix profonde et fredonnée. Son compagnon Joakim Benon entre à son tour tout aussi couvert d’habits monacaux (ce qui ne durera pas), pour s’accrocher derrière elle avant de mimer un pistolet sur sa tempe comme sur certaines de leurs photos de presse. Il se saisit finalement de sa guitare pour apporter la touche électrique qui fera décoller les compositions cold-wave vers une indie pop atmosphérique. Ces sonorités sont simples sans être simplistes, les mélodies alliant le cristallin d’un glockenspiel mis à nu à des instrumentaux hip-hop subits qui feront remuer l’audience. JJ se permet même de rares incursions eurodance, dont ils n’ont jamais caché l’influence puisqu’ils avaient repris le fameux tube 90’s It Goes Around the World de ATC dans une version dépouillée en fermeture de leur fabuleux titre My Life. Cette incursion 90’s nous permettra d’apercevoir le sourire d’Adèle qui a finalement libéré sa chevelure. Joakim Benon enlèvera les couches de vêtements pour se retrouver torse nu, sa longue chevelure blonde atteignant presque le sol lorsqu’il se penche sur sa guitare comme un héros des 80’s. Il se glissera alors derrière Elin, légèrement embarrassée, pour se perdre dans sa nuque. Leur fameux titre Let Go, à la grâce éthérée, se voit prolongé par un harmonica ainsi que par des sursauts électroniques dispersés par le DJ barbu caché derrière ses machines. Le groupe de Göteborg nous gratifiera d’une reprise de Dr Dre en rappel avec le fameux tube Still qui nous fera esquisser de larges mouvements de tête. Ce groupe très attachant parvient à incorporer des sonorités très variées, du rap à la dance, en passant par l’electronica, pour en sortir un précipité de pop suédoise en slow motion. Et curieusement, cela fonctionne extrêmement bien même sur un chroniqueur pas forcément à l’aise avec toutes ces influences.

Les concerts furent brefs mais on en ressort un peu comme d’une grotte discothèque suédoise avec meatballs à volonté, peuplée d’elfes blonds en toge qui écoutent The Knife, Haddaway et Dr Dre. Bref, la soirée du Nouvel An parfaite.