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Chronique de disque
Darkside - Psychic

20 octobre 2013
Rédigé par Florian Sallaberry




Darkside - Psychic

Sortie le 7 octobre 2013

Note : 4,5





En 2011, Nicolas Jaar squattait tous les tops indie annuels avec son premier album : Space Is Only Noise. Album OVNI de 13 morceaux expérimentaux s’articulant autour du titre presque éponyme, Space Is Only Noise If You Can See, véritable machine à danser. Lors de la préparation de sa tournée, Nicolas Jaar souhaite recruter des musiciens et rencontre dans ce but Dave Harrington, guitariste. Quelques mois plus tard, dans une chambre d’hôtel, à Berlin, les deux New-Yorkais décident de composer ensemble. À la tombée de la nuit naît l’idée de Darkside. Le duo publie son premier EP éponyme dans la foulée, sorte de travail préparatoire. On retrouve des sonorités free jazz, du blues… dans un esprit tantôt pop tantôt antipop. Le son de Darkside est inclassable, paradoxal et unique. 

Quelques jours après la sortie de Random Access Memories, le dernier album des Daft Punk, Jaar et Harrington s’amusent à distordre Get Lucky. Contents de leur méfait, les deux rigolos s’attaquent ensuite à tout l’album et signent DaftSide, meilleurs travaux issus de l’album des deux casqués jusqu’alors. L’ambiance est différente : fini de funker en pantalons patte d’éléphant avec Nile Rodgers, nous sommes dans une ruelle sombre, remplie de fumée à l’atmosphère glauque et lourde : « Viens, rejoins le côté obscur ».
En cette fin d’année sort donc le premier album du combo new-yorkais, Psychic, dont le titre et la pochette suggèrent une expérience de l’âme : il faudra laisser sa rationalité de côté, peu importe les paroles du vieux Kenobi. Le son de Darkside évolue entre passages bruitistes et passages plus mélodieux, comme l’illustre le premier morceau de l’album, Golden Arrow : un début expérimental, puis un gimmick entêtant où il est impossible de ne pas hocher la tête, taper du pied voire d’entrer en transe. « Oui, tombe sous le charme pour de meilleurs lendemains ».

Tout au long de l’album, nous ressentons le son paradoxal de Jaar, quelque part entre les travaux de Oneohtrix Point Never et une électro plus dansante à base de nappes de synthétiseurs (Freak Go Home). Le travail sur les voix est également assez caractéristique : tantôt graves (Paper Trails) ou aigües (Golden Arrow, Metatron), elles deviennent instrument sur Greek Light et ses bribes de voix enchevêtrées. « N'aie pas peur, ouvre-moi ton coeur, viens vers l'Empereur ».
Mais si nous succombons totalement, c’est parce que le travail de l’Empereur Jaar est magnifié par la guitare de son fidèle bras droit Dave Vader. Cet album est un vrai album de guitares aux influences multiples : garage, blues rock, funk dépouillé… Harrington explore tous les genres. L’alchimie est parfaite, nous sommes conquis, déjà notre esprit est ailleurs. « Le souffle de la force est en moi ».

Nous voilà happés par la bulle de Psychic, pris au piège du Darkside et nous y sommes bien. Nous écouterons cet album deux fois, trois fois d’affilée et nous découvrirons dans les méandres de ce son complexe de nouvelles raisons de nous réjouir à chaque écoute. Notre main droite est gantée de noir, la mutation s’amorce… nous attendrons le 31 octobre avec impatience, et la venue du duo dans la Grande halle de la Villette à l’occasion du Pitchfork Music Festival pour définitivement vendre notre âme au Darkside