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Chronique de disque
Fenster - The Pink Caves

26 mars 2014
Rédigé par François Freundlich




Fenster - The Pink Caves

Sortie : 7 mars 2014

Note : 4,5 / 5





Le Berlinois Jonathan Jarzyna et la New-Yorkaise JJ Weihl sont à la base de Fenster, trio complété du percussionniste français Rémi Letournelle et basé à Berlin. Fenster avait attiré notre attention avec un premier album intimiste et passionnant. Cette suite du nom de The Pink Caves oscille entre une dream-pop flottante, des percussions tribales et un psychédélisme sibyllin.

Ce disque est avant tout une pièce à écouter dans son ensemble puisque sa grande cohérence et l’enchaînement de titres marquants poussent à ne jamais stopper son évolution. Fenster parvient à perpétuellement nous entêter d’un gimmick synthétique qui semble ne devoir jamais quitter le cerveau et dont on ne se lasse jamais, formant une racine pop avec des embranchements en perpétuelle déviance. L’introduction sur Better Days et son accélération de guitare accrocheuse en sont le parfait exemple. Les percussions bizarroïdes et autres bruits enregistrés sont toujours là pour surmonter les boucles de guitares électriques cotonneuses d’arrière-plans fantomatiques. The Pink Caves évolue dans une certaine quiétude, on avance au ralenti dans ces caves sans savoir sur quoi on va forcément trébucher. Ses synthétiseurs spatiaux nous aspergeant comme un vent solaire et la voix féminine grave, froide mais délicieuse de JJ nous rappellent Lower Dens dans les passages instrumentaux cosmiques ou Beach House pour les singles les plus évidents comme In The Walls. Mais Fenster d’évade également vers un folk psyché avec cette guitare acoustique doublée de résonnances électriques multiples sur Cat Emperor (au fait, l'une de leur chanson s’appelle Cat Emperor).

La voix n’est jamais la même, se modifiant au fil des textes imaginaires, utilisant parfois un vocodeur rappelant Fever Ray pour la robotiser dans les graves. Fenster peut s’abîmer dans des passages très sombres marqués par des beats cassés, un minimalisme électro-acoustique hors du temps et des textes forts comme ce « I’m going to see my True Love, I’m going to watch him die » sur True Love. Ils peuvent aussi enchaîner sur des berceuses ornées de xylophones angéliques comme Mirrors, qui s'égayent puis prennent leur temps pour se perdre. Cette musique cinématographique puise du côté du fantastique avec des orchestrations oniriques et chamaniques peuplées de chœurs multiples ou de rythmiques de trains en marche. La voix masculine reprend ses droits sur la fin de l’album, donnant un second souffle à un album ne s’épuisant jamais, comme sur l’entêtante Hit & Run où les deux voix se répondent. Pour l’achever, on a même l’impression d’entendre un autre groupe sur 1982 et ses relents électro-pop.

La fenêtre galactique ouverte par Fenster avec cet album lumineux et intrigant peut nous faire flotter très haut. Les idées foisonnent, se percutent, s’enchaînent et sont souvent si immédiates qu'on en est ébloui dès la première écoute. Sa cohérence le rapproche de la perfection et l’on ne peut que porter au panthéon ce deuxième album marquant, peut-être le meilleur de ce début d’année.