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Chronique de disque
Lysistrata – EP Pale Blue Skin

30 mai 2017
Rédigé par François Freundlich



Lysistrata – EP Pale Blue Skin

Sortie le 31 mai 2017

4,5/5



Derrière ce nom énigmatique, reprenant celui d’une pièce antique d’Aristophane où les rôles d’hommes et de femmes se voient inversés, se cache l’un des groupes les plus excitants qu’il nous ait été donné d’entendre cette année. Le trio franco-anglais Lysistrata de Saintes en Charente-Maritime n’a que 18 ans de moyenne d’âge mais possède pourtant des compositions foisonnant d’idées et d’une fraîcheur pénétrante.

 

À l’écoute de ce deuxième EP, ce n’est pas uniquement les 34°C extérieurs qui nous font bouillir le cerveau. Cette guitare lourde et insouciante, oscillant entre math-rock incisif, post-punk dérivant et post-hardcore hurlant, est parfois interrompue par des passages rejoignant la pop atmosphérique. Les excitations subites ne sont jamais laissées seules et des passages subtils et calmes leur succèdent forcément. Lysistrata ne tombe pas dans la facilité en laissant leur simple rage prendre le dessus mais lui accole à chaque instant des passages réfléchis, la beauté succédant à la rudesse. La voix sombre et monocorde se fraie un passage entre les assauts de guitares lorsqu’elle ne se déchaîne pas dans de larges cris sauvages. Les changements de direction sont légion, avec ces coupures soudaines, passant de déclamations en retrait à des déferlements rappelant parfois Hell Is For Heroes. Ce disque a beau n’être qu’un EP, les changements incessants en font presque un album où l’on aurait gardé et compressé la substantifique moelle.

 

Sur Pantalon Pantacourt, un titre de saison, on ne sait jamais si on doit contempler, s’exciter ou danser. On passe du mid- au up-tempo avant de se relâcher complètement, ce qui ajoute un côté épique un brin magistral. Sur Pierre Feuille Ciseaux, on entraperçoit la jeunesse du trio avec ces chœurs pop qui lâchent leur côté sérieux pour une face plus fun, de moins de trois minutes. Ce qui n’empêche pas le morceau de changer du tout au tout, passant du coq à light en quelques secondes. Lysistrata donne l’impression d’un groupe qui en a encore énormément sous la pédale, au sens propre comme au figuré. Ça s’envole et ça déploie ses ailes dans un final étourdissant semblant nous emporter toujours plus loin.

 

Les lauréats du prix Ricard Live Music 2017 sont à la hauteur des espérances et du frisson que nous procurent leurs concerts. Le trio se produira au Nouveau Casino de Paris le mercredi 31 mai pour une release-party gratuite qui s’annonce torride.