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Chronique de disque
Von Pariahs - Hidden Tensions

23 septembre 2013
Rédigé par Amandine Hénon

Von Pariahs - Hidden Tensions

Sortie le 30 septembre 2013

Note : 4,5/5

 

Un soir d’août 2012, moment de creux au For Noise Festival, aux alentours de Lausanne ; c’est pendant une errance entre deux scènes que notre oreille est intriguée par un son rugueux et une voix un brin caverneuse, suffisamment moderne pour ne toutefois pas tomber dans la parodie "Joy Divisionienne" souvent entendue. On découvre alors sur scène un groupe se démenant, suant sang et eau, habité par de vieux fantômes tout droit sortis du début des 80’s. Sans douter une seule seconde, on se dit que ceux-là sont forcément anglais et quelle n’est pas notre surprise lorsqu’on les entend parler français ! Nous ne l’espérions plus, certains que la France continuerait ad vitam aeternam à se cantonner à la variété ou la pop mielleuse ; et pourtant…

Après un passage très remarqué aux Transmusicales 2012 et une prestation de haut vol au Café de la Danse en compagnie d’Agent Side Grinder, Von Pariahs nous livrent aujourd’hui Hidden Tensions, leur premier album studio. Respectant jusqu’au bout leur intégrité, ils sont signés chez Yotanka, petit label qui, selon eux, saura mettre en avant leur premier-né et le chérir autant que faire se peut. Moins expéditifs qu’un combo punk mais cherchant toujours à aller à l’essentiel, ces jeunes Nantais d’adoption brassent à foison du côté des 80’s et là où certains groupes se cassent les dents à vomir une soupe indigeste d’influences trop présentes, Von Pariahs nous permettent de retrouver l’essence de l’âme torturée d’un Ian Curtis ou d’un Jon King (Gang of Four).
Sur un artwork de Théo Mercier intitulé « La famille invisible », présentant un groupe de fantômes un tantinet décalés, l’ode aux heures sombres et belles des années 80 retentit. S’ouvrant sur un titre teinté de pop mais restant tout de même dans l’univers new wave/post-punk si propre au groupe (Gruesome), nous avons le choc de découvrir une production si travaillée puisqu’à deux ou trois exceptions près, nous ne connaissions Von Pariahs qu’en live, avec un son volontairement noisy.
Pas un moment de creux sur ce Hidden Tensions : chaque morceau contient ce son abrasif et malgré un univers situé quelque trente années en arrière, le résultat est frais et moderne. Du brûlot post-punk qu’est Skywalking avec sa progression parfaite, aux rythmiques très stop & go de Nerves, en passant par la redécouverte de Someone New, aucune pause n’est envisageable. Dès le début, l’auditeur est doucement amené dans l’ambiance : Carolina débute sur une batterie martiale et la voix froide de Sam, accompagnée d’une ligne de guitare et surtout, de ces petits effets, installent une ambiance tendue pour éclater à certains moments ou au contraire prendre l’auditeur à contrepied en envoyant une petite mélodie.
Même quand ils s’essaient à la ballade pop gentillette (At the Fairground), la personnalité est certes moins marquée mais ils ne tombent pas dans la niaiserie.
La froideur des claviers, le léger contretemps mettant le morceau en perpétuelle instabilité et cette litanie : « I don’t want to wake up, I like talking to the dead », c’est ainsi que 19.09 clôt ce qui sera sans conteste un temps fort de cette année 2013.

Sachant allier la musicalité de la new wave à la hargne du post-punk, Von Pariahs, à l’image de The Popopopos, renouvelle le rock français, en disette depuis trop longtemps. Grâce à des rythmiques puissantes et pêchues, une empreinte vocale marquée, le sextet frappe ici un grand coup.